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La 100e de Jérémy Florès

A Snapper Rocks, Jérémy Florès va signer sa 100e apparition sur le Championship Tour ! A Snapper Rocks, Jérémy Florès va signer sa 100e apparition sur le Championship Tour !  © WSL

Jérémy Florès va participer à sa 100e compétition sur le circuit CT à Snapper Rocks (Australie), en ouverture de la saison 2017 de la World Surf League qui débute ce mardi (14-25 mars). Retour en mode interview depuis Coolangatta où le Réunionnais va enfiler le lycra pour la 317e fois en 10 ans.



Jérémy, savais-tu que tu vas disputer à Snapper Rocks ta 100e compétition sur le CT ?
Non, je ne le savais pas. 100 compétitions sur le CT ! Ça calme ! Quand j’ai commencé, si on m’avait dit que j’allais faire 100 CT et être au moins 11 ans sur le tour, j’aurais signé tout de suite. Surtout, je n’y aurais pas cru. (Il réfléchit) Ça calme de se dire que j’ai fait 100 CT. C’est passé vite. J’ai l’impression que j’ai débuté l’année dernière. Et en même temps ça a été très long.

Comment expliques-tu ta longévité ?
Je me suis qualifié jeune, j’avais 17 ans. J’étais le plus jeune de l’histoire à le faire. Beaucoup de gens ont dit : « c’est un trop petit gabarit, il n’a pas encore la puissance pour être sur le CT. » Et j’ai terminé 8e mondial dès la première saison. Je savais que je devais travailler beaucoup de points pour m’améliorer. J’ai toujours été compétiteur, j’ai voulu progresser et m’adapter. J’ai du m’adapter aux nouvelles générations. Me remettre sans cesse en question.

Après dix années, tu aurais même dû dépasser la barre des 100 CT depuis au moins une saison...
Oui mais j’ai eu beaucoup de blessures. Ça m’a souvent freiné dans ma progression. Mais j’ai continué, je n’ai rien lâché. Ma carrière ressemble à des montagnes russes, elle est faite de hauts et de bas. Blessé, j’ai toujours réussi à me rattraper sur les plus belles vagues, alors que je galérais dans les vagues moyennes car j’y étais moins performant avec mes problèmes aux chevilles. 

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« J'aimerais faire un break mais, moi, je ne peux pas me le permettre… »

On revient sur la longueur de ta carrière. Après dix ans et 100 CT, comment fais-tu pour garder la motivation ?
J’ai un approche plus mature, plus relâchée. Le World Tour est mon mode de vie. Mon équilibre. Je vais faire mon 12e Snapper. La lassitude est la chose la plus dure à gérer. Il faut garder la hargne pour ne pas être en dedans. J’ai face à mois des jeunes qui arrivent et qui sont morts de faim. Comme moi sur mes premières années. Pour être encore dans le coup, je me repose sur mon expérience. Ça aide, ça peut jouer en ma faveur. Mais forcément, ma priorité est de conserver la motivation. Il en faut pour encore passer des heures dans l’eau à s’entraîner dans n’importe quelles conditions.

En regardant tes statistiques que nous a fournies le site Surfagram.com, on s’aperçoit que si tu as 67% de victoires en finales : 2 sur les 3 que tu a faites, tu bloques très souvent en demi-finales avec seulement 3 victoires en 11 demis (27% de réussite). Comment l’expliques-tu ?FLROES STATS
Je pense que ma préparation physique est un des facteurs essentiels. A partir des quarts ou des demis, je suis souvent très fatigué car pas forcément préparé de la meilleure manière. J’ai un surf très explosif, très tonique et je fatigue très vite. Mon point faible, encore aujourd’hui, reste l’endurance. Je vais performer sur deux-trois séries mais après je suis totalement crevé. Il y a deux ans, je fais deux finales de 10.000 à la suite (Trestles et Saquarema, ndlr), et les deux fois j’arrive en finale totalement cuit. Je dois encore travailler l’endurance pour être plus performant. Je fais les efforts pour mais là aussi, tout est une question de motivation.
Il y a 10 ans, j’aurais du en faire davantage. Mais à l’époque, je me suis appuyé sur mon talent naturel au lieu d’aller travailler davantage la préparation physique. J’aurais sans doute pu aller plus loin en le faisant... Ou pas ! Qui sait, j’aurais pu être plus fatigué aussi ?

Pourquoi n’avoir jamais fait de break comme Mick Fanning ou Kelly Slater afin de revenir « rechargé » ?
J’ai voulu le faire il y a trois ans. J’aurais bien aimé mais... Ce n’était pas si facile que ça; et ça ne l’est toujours pas. Je ne peux pas me le permettre car je ne suis pas un "chouchou" de la WSL. Je ne suis pas le surfer qu’on va laisser faire un break et lui offrir une wild card quand il voudra revenir. On m’a même plutôt poussé vers la sortie... Mais bon, ça fait ma force. En dix ans, j’ai du faire face à certains « soucis » et ça m’a donné encore plus de motivation. Mais pour en revenir à la question : oui, j’aimerais faire un break. Ça me ferait un vrai grand bien. Aller faire des trips, travailler ma technique, revenir frais. Au lieu de ça, je dois continuer, continuer, continuer. Fanning, il a fait un break, il a passé du bon temps. Aujourd’hui, il a retrouvé l’amour de surfer. J’aimerais avoir cette même chance de pouvoir souffler. Mais je ne peux définitivement pas me le permettre.

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« Le Teahupoo énorme de 2011 est une de mes plus grandes fiertés »

Qu’est-ce qui a profondément changé en toi entre tes débuts et aujourd’hui ?
Je suis plus mature. Plus posé. Avant je réfléchissais moins. Je fonçais, je ne pensais qu’à moi, je ne me posais aucune question. En compétition, tout se joue au mental. La saison dernière aura été celle où j’ai été le plus satisfait de mon surf, et elle a pourtant été la pire en terme de résultats.
A 28 ans, je ne suis plus tout seul. Je penses à ma famille, au futur, à apprendre autre chose quand je vais dans un pays. Et pas uniquement surfer du matin au soir sur le spot de la compétition. J’ai été comme ça. Quelqu’un qui n’était pas trop apprécié car je ne pensais qu’à moi. Il faut être quelqu’un de pas très forcément « agréable » pour réussir. C’est le prix à payer. Kelly Slater a été beaucoup critiqué en ce sens dans sa carrière mais il est qui il est. Il est là pour performer. Je fais référence à Kelly mais regardez Roger Federer ou Novac Djokovic dans le tennis. Ils sont aussi comme ça. Ils n’ont pas le temps de s’éparpiller, il ne font qu'être focus sur leur sport. Ce sont d’énormes sacrifices, tu peux perdre beaucoup d’amis.... Ça m’est arrivé. Je ne me vois plus faire ça. Je ne me vois plus zapper les autres. Au contraire, aujourd’hui, je suis plus ouvert, plus dans le partage, plus dans la transmission. Je suis même devenu une sorte de papa poule (rires). A Snapper, j’héberge en ce moment des jeunes comme Mathis Crozon et Kauli Vaast.

Tu as réalisé des choses incroyables et notamment gagné les deux plus belles compétitions du World Tour : Pipeline (2010) et Teahupoo (2015). Quel est ton plus beau souvenir en 10 ans et 99 CT ?
Tu te souviens toujours du vainqueur, pas du deuxième. Tu te souviens du nom de celui qui a remporté la compétition. C’est pour ça que ma grande fierté est d’avoir mon nom au palmarès de Pipeline et de Teahuppo. C’est écrit à vie. Mais il y a aussi un challenge qui m’a beaucoup apporté : c’était en 2011 à Tahiti. La compétition de Teahupoo de cette année-là s’est tenue dans les plus grosses conditions jamais eues. C’était quelques mois après ma victoire au Pipe Masters. C’était spécial pour moi car je devais prouver beaucoup de choses au monde. Je me sentais confiant, même si à Teaghupoo tu flippes toujours. Je n’avais jamais eu l’occasion de montrer ce que j’étais capable de faire dans des vagues aussi grosses. Je n’avais jamais surfé aussi gros en compétition.
Lors du deuxième tour, les vagues étaient d’une autre planète, limite pas surfables. J’étais dans la première série de la journée, contre Heiarii Williams, un des boss du spot. J’au réussi à me qualifier en prenant beaucoup de risques (9,67 à 0,17 pt). Après (en 8es), je fais cette série de dingue avec Michel Bourez où j’obtiens mon 20/20 et lui fait 19 et quelques (18,73 pts en fait). Puis je perds en quarts dans des plus petites vagues (contre Josh Kerr, 11,94 à 11,83). Je sors grandi de cette compétition et puis on me remet le Andy Irons Trophy, récompensant le surfeur le plus engagé.
Alors, oui. Si Pipe et Teahupoo resteront à jamais, cette compétition-là est très importante pour moi.

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« Avant, à 28 ans, t'étais un jeunot… »

Il n’y a qu’une poignée de surfeurs plus expérimentés que toi. Mais plus âgés aussi. Te rends-tu compte que tu es un vétéran du tour à 28 ans ?
C’est dingue ! Quand je suis rentré sur le tour, tous les surfeurs avaient 28 ans. A 28 ans, t’étais un jeunot. Aujourd’hui, la moyenne d’âge est beaucoup plus jeune. Quand on regarde donc de plus près, ce n’est pas mon âge qui fait de moi un vétéran. C’est mon expérience.
100 CT ça pèse effectivement ! C’est une longue carrière. C’est une vie non stop pour le surf en compétition. On a un des plus beaux métiers au monde, mais qui prend de l’énergie et du temps.

Te vois-tu sur le tour avec dix ans de plus et la barre des 200 CT ?
(Rires) On va déjà voir comment la 100e compétition va se passer !


La Biographie de Jérémy Florès

 

Dernière modification le : 13 mars 2017
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